Mise en avant

Parution évènement de l’ouvrage « Dermatologie de la diversité » (2022)

Penser Divers pour être Meilleurs

Les particularités dermatologiques pouvant être liées à la diversité populationnelle sont multiples. Outre les spécificités en rapport direct avec le degré de pigmentation de la peau, les conséquences d’une exposition à un environnement particulier, notamment à certaines maladies endémiques, y participent.

Cet ouvrage innovant, exhaustif et très didactique, qui comporte 49 chapitres, de nombreux tableaux et près de 350 photographies, résulte d’une coopération internationale ayant fait appel aux meilleurs spécialistes dans leur domaine.

En définitive, ce livre vise à constituer un référentiel de connaissances sur des thématiques souvent peu abordées dans la littérature ou lors de l’enseignement de la spécialité, avec pour objectif ultime une universalité de la qualité des soins prenant en compte la diversité des populations.

Mise en avant

Dernières nouvelles d’Hyderabad

Le vingt-et-unième congrès international sur la lèpre s’est tenu du 9 au 11 novembre 2022 dans la ville indienne d’Hyderabad. Environ un millier de participants y ont été physiquement accueillis, sans compter presque 500 inscriptions supplémentaires virtuelles. Le nombre de 960 présentations, en incluant les posters, a été atteint.

Et si le dépistage d’une « lèpre latente » était LA solution ?…

A côté d’une valeur de confirmation de cas douteux suspects de lèpre, une double positivité [qPCR sur lobe d’oreilles + sérologie anti-PGL1 IgM] chez un contact familial par ailleurs asymptomatique, définissant une « lèpre latente », pourrait être un facteur important de dissémination de la maladie, ainsi que de risque de développement ultérieur d’une authentique maladie.

Cette catégorie de population représente donc sans doute une cible de choix, non seulement pour un dépistage d’une « lèpre maladie » ultérieure, chez des patients qui devraient être activement surveillés, mais aussi peut-être pour l’administration ciblée d’une prophylaxie, de façon à interrompre précocement la chaine de transmission.

Cette étude remarquable, menée au Brésil et en fait déjà publiée en 2021 dans PLOSone, pourrait avoir un impact déterminant sur les politiques futures de dépistage de la lèpre.

Réactions

Les réactions lépreuses sont un domaine où l’attente vis-à-vis de progrès dans la prise en charge est très forte. Si rien ou peu s’en faut n’a concerné durant ce congrès les réactions de type 1, plusieurs communications ont enrichi le sujet des réactions de type 2 (encore volontiers référencées sous le terme « érythème noueux lépreux ») (ENL).

  • #F-52. Palit A. Management of steroid dependent ENL

Rappelons l’alerte comme quoi les patients présentant un ENL chronique sembleraient plus souvent résistants aux antibiotiques anti-hanséniens usuels.

Inhibiteurs de la phosphodiestérase-4

Les progrès les plus importants concernent sans doute l’espoir suscité dans le traitement de l’ENL par différents inhibiteurs de la phosphodiestérase-4, à savoir l’aprémilast (médicament déjà indiqué dans certains cas de psoriasis et de maladie de Behçet), et un nouveau composé le CC-11050.

Aprémilast. Un effet rapide (en 10 jours) permettant un sevrage complet en autres composés anti-inflammatoires, avec maintien prolongé, a été observé chez 5 patients présentant des ENL récidivants.

CC-11050. Il s’agit d’un dérivé non tératogène de la thalidomide. Lors d’un essai pilote au Népal chez 10 patients présentant des ENL aigus ou récidivants, un effet rapide (en moins de 10 jours), avec rémission constante à 28 jours de traitement, a été constaté en tant que seul composé utilisé. Biologiquement, une baisse de certains marqueurs de l’inflammation était corrélée à l’amélioration clinique (IL6, IL2Ra, TNFR1, CRP). De faibles doses de corticoïdes à distance chez la moitié des patients ont été nécessaires pour traiter des récurrences modérées. Les effets secondaires étaient minimes.

  • #0342/ILCABS446. Krishna J et al.
  • #0164/ILCAB752. Shah M et al.
  • #0344/ILCABS 489. Simmons JD et al.

Clofazimine

Composé pour lequel se dégage un consensus concernant un intérêt, certes modéré mais confirmé, en termes d’épargne corticoïdes en cas d’ENL chronique/récidivant (aux fortes posologies telles qu’usuellement recommandées par l’OMS : 300 mg/j pendant 1 mois, 200 mg/j pendant 3 mois, puis 100 mg/j), par contre aucun effet préventif n’est admis.

  • #F56. Balagon MF
  • #0562/ILCABS143. Pai VV et al.

Anti-TNF

Des données ponctuelles existent pour certains d’entre eux (adalimumab, infliximab, etarnecept). Rappelons le faible nombre de cas étudiés avec ces composés, un effet semblant de rapidité variable (de quelques heures à 6 semaines…), l’effet sur le long terme finalement modéré en termes d’épargne d’autres composés notamment de corticoïdes, leurs effets secondaires potentiels, et que, par ailleurs, un traitement par anti-TNF est susceptible de démasquer une lèpre chez des patients traités pour un autre motif médical.

  • #0352/ILCABS663. Jangid NC et al
  • #0341/ILCABS320. Abbas F
  • #0805/ILCABS389. Mandal S

Divers

Le méthotrexate, sur lequel de grands espoirs ont été fondés, semble disposé d’un effet d’épargne corticoïde notable lors des réactions de type 2 mais aussi de type 1. Lors d’une étude présentée, 62% des patients ont pu bénéficier d’un effet d’épargne corticoïde pouvant aller jusqu’à un sevrage complet. Cependant, un traitement prolongé (de durée indéterminée) semble souhaitable, une rechute survenant après arrêt de ce traitement dans 42% des cas. A noter que l’étude ambitieuse annoncée lors du précédent congrès mondial par l’équipe londonienne, visant à étudier méthodiquement l’intérêt du méthotrexate lors de l’ENL, n’a pu être menée pour l’instant du fait de la pandémie COVID.

La ciclosporine. Possible intérêt en traitement d’attaque plus qu’en épargne corticoïde évalué dans une dizaine de cas d’ENL récurrents.

Le/la thalidomide reste bien entendu un traitement remarquablement efficace, même si de nouvelles interrogations existent quant à la neurotoxicité de ce composé chez des patients ayant des nerfs déjà affectés s’additionnant aux risques tératogène et thrombotiques déjà bien connus.

La colchicine, composé peu coûteux et généralement bien toléré, de plus facilement accessible, pourrait avoir un intérêt dans certains cas. Son intérêt résiderait dans son pouvoir d’inhibition du chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles, cellules ayant un rôle important dans la physiopathologie de l’ENL.

  • #0775/ILCAB775. Sachdeva S et al.
  • #0803/ILCABS55-S56. Jaume L et al.
  • #0775/ILCAB775. Sachdeva S et al.

Le phénomène de Lucio, une complication rare et qui reste assez mystérieuse

Une mise au point éclairante sur le phénomène de Lucio et ses relations avec les réactions de type 2 (ENL) a été présentée. Les cas de phénomène de Lucio ont été décrits presque exclusivement avec la souche M. lepromatosis, qui ne semble relativement fréquente qu’au Mexique – quoique quelques cas aient été occasionnellement observés ailleurs (en Asie notamment).

Le tableau de nécroses cutanées extensives, classiquement de forme triangulaire, et/ou distales, avec fréquentes amputations secondaires d’extrémités, est caractéristique, et se distingue assez nettement de celui de l’érythème noueux nécrotique (qui peut toutefois être présent chez les mêmes patients). L’histologie est utile, montrant des thromboses vasculaires « froides », sans les polynucléaires neutrophiles qui représentent les meilleurs marqueurs histologique de l’ENL. La présence d’anticorps de la série antiphospholipides ou d’une cryoglobuline a également été rapportée.

Phénomène de Lucio (crédit photo Ochoa MT)

Outre les corticoïdes à forte dose, l’adjonction d’une anticoagulation semble logique. A noter l’effet favorable du tofacitinib oral (inhibiteur des lymphocytes Th17) dans un cas de phénomène de Lucio associé à ENL chez un patient indien présentant une infection double M. leprae/M. lepromatosis.

  • Ochoa MT. F-29. Lucio leprosy and immune reactions.
  • Patel K et al. ILCABS561

Résistance de M. leprae aux antibiotiques : le point de la situation en 2022

Des données issues de diverses zones géographiques, notamment des deux plus grands foyers mondiaux actuels de la maladie (Inde et Brésil), attestent de l’expansion lente mais continue de souches de M. leprae résistantes à un ou plusieurs antibiotiques utilisés dans la lèpre. Des cas rares mais préoccupants de résistance à plusieurs de ces composés (rifampicine, dapsone, ofloxacine) ont été signalés. Les cas de résistance primaire, y compris à la rifampicine, continuent d’émerger.

Un point remarquable est la fréquence apparemment anormalement élevée de cas de résistance bactérienne chez les patients présentant cliniquement des réactions. La survenue d’un épisode réactionnel doit donc inciter à effectuer une étude de la sensibilité de la souche bactérienne impliquée – si bien sûr cette démarche n’avait pas été entreprise auparavant.

Outre la difficulté de prise en charge de ces patients multirésistants et/ou résistants à la rifampicine, il est recommandé d’adopter une vigilance accrue concernant les contacts de ces patients, en effet à risque de développer une lèpre avec résistance(s) primaire(s), en recourant dans cette situation à des techniques de contact tracing.

Ceci incite bien entendu à développer l’analyse large et si possible systématique du profil de résistance de toute souche de M. leprae identifiée (rappelons que, en l’état actuel des connaissances, ceci ne peut être effectué que chez des patients multibacillaires), ainsi qu’au développement de nouveaux antibiotiques efficaces dans cette maladie.

  • Segupta U. #F-32. Présent evidence of AMR in leprosy
  • Muddebiyal AA et al. #0430/ILCABS361. A case control study of resistance in type 1 and 2 reactions.
  • Darlong J et al. #0170/ILCABS857. Study of drug resistance in M. lepare isolates from reactional leprosy patients.
  • Singh I et al. #0761/ILCABS260. Transmission of resistant strain of M. leprae in the contact of leprosy cases : a report.

L’échographie des nerfs, une technique d’intérêt confirmé

Cette thématique réapparaît lors de chaque congrès mondial, mais s’affirme, s’affine, et confirme qu’elle est d’importance. Des techniciens entraînés utilisent ainsi couramment la technique d’échographie-doppler à haute résolution (HRUS), et ce avec différents objectifs : d’ordre diagnostique tout d’abord, par évaluation objective de l’augmentation de volume d’un nerf (dont on rappelle la grande valeur diagnostique), ainsi que de son irrégularité qui peut n’être en effet que focale (focality), au mieux comparativement (un côté avec l’autre) ; lors des réactions, où l’inflammation est au mieux évaluée par effet Doppler et s’avère susceptible de guider la prise en charge médicale (dont on rappelle qu’elle est délicate en termes de durée de traitement notamment) ; voire de dépistage, lors de campagnes  en population générale plus ou moins ciblée (contacts de cas avérés). Rappelons le coût somme toute modique d’un appareil échographe/Doppler, dont chaque centre de référence pourrait (devrait ?) envisager l’acquisition, si ce n’est déjà fait.

  • Jain S et al. #F47. HRUS of peripheral nerves in leprosy.
  • Voltan G et al. #0153/ ILCABS637. Point of care ultrasound of peripheral nerves in the diagnosis of Hansen’s disease neuropathy.
  • Voltan G #0426/ ILCABS702. Peripheral neuropathy among contacts of Hansen’s disease patients contacts detected by HRUS of the peripheral nerves.

Une initiative pour un essai comparant un traitement par ROM mensuel à la PCT standard de la lèpre

Diana Lockwood (Londres), s’appuyant sur une analyse des effets secondaires parfois sévères occasionnellement rencontrés avec les composants classiques de la PCT anti-lèpre (notamment réactions d’hypersensibilité sévères à la dapsone, ou encore moins grave mais parfois affichante pigmentation cutanée à la clofazimine), a effectué un plaidoyer pour la menée d’une étude comparant à la PCT classique une association un petit peu ancienne, mais insuffisamment documentée, consistant en la prise mensuelle pendant un an d’une dose de chacun des 3 composés suivants : rifampicine, ofloxacine, et minocycline.

Si l’on peut aisément admettre que la dapsone est un composé problématique à plusieurs égards (outre les effets secondaires graves cités auxquels on peut rajouter la fréquence d’une anémie, composé doté par ailleurs d’une activité seulement bactériostatique et fréquence croissante des résistances primaires ou secondaires), le principal effet secondaire de la clofazimine est une pigmentation transitoire (visible durant le traitement) qui ne justifie sans doute pas une « mise au ban » aussi radicale. Le coût estimé par D. Lockwood d’une telle étude montre également certaines limites de cette initiative (1,5 million US$). Rappelons en outre que l’OMS valide d’ores et déjà (depuis 1997) le traitement par ROM mensuel (pendant 24 mois) chez les patients refusant la clofazimine, en alternative à une autre option que serait le remplacement de la clofazimine par une prise quotidienne d’ofloxacine ou de minocycline dans le schéma de PCT usuel.

  • Lockwood Diana. Need for new MDT for leprosy: why and how ? Plenary session (09/11/2022)

Retentissement de la pandémie COVID-19 sur l’identification de nouveaux cas de lèpre

La pandémie COVID-19 a fortement perturbé l’identification et le recensement des nouveaux cas de lèpre de par le monde, avec une chute brutale du nombre de nouveaux cas mondiaux passé de 202.185 en 2019 à 127.396 en 2020 et cependant un sursaut en 2021 avec 140.594 nouveaux cas identifiés.

Un élément supplémentaire de préoccupation est le caractère « genré » de ce déficit, avec une proportion féminine de nouveaux cas en 2020 de seulement 39% (alors qu’on s’attendrait à une égalité avec le nombre de cas identifiés chez des sujets de sexe masculin). D’autres déficits spécifiques analogues ont d’ailleurs été à déplorer chez les enfants, ainsi que pour ce qui est de l’identification de cas multibacillaires.

Un rattrapage partiel de ces déficits s’est heureusement effectué spontanément en 2021. Un programme spécifiquement dédié à la problématique du déficit de diagnostic chez les femmes a été mis en œuvre au Bangladesh, permettant de rattraper plus complètement cette inégalité de genre.

  • Plenary session (09/11/2022) : WHO representative.
  • Pender JS et al. ILCAB S60. The missing thousands. Bridging the gender gap in leprosy case detection

Lèpre zoonotique et animaux hébergeurs

Une présentation passionnante du Dr JS Spencer (Colorado) a répertorié les situations de mise en évidence de M. leprae chez des animaux, avec ou sans transmission humaine avérée.

Le tatou à 9 bandes est désormais un hôte bien connu. Des cas avérés de transmission de M. leprae du tatou à l’homme ont été établis dans les états du Sud des Etats-Unis (Louisiane). Alors qu’environ un tiers des tatous nord-américains sont infectés par M. leprae, presque 100% des tatous à 6 bandes le sont dans le Nord-Est du Brésil, pays où cet animal est par ailleurs régulièrement consommé en tant que gibier dans certaines zones rurales, avec dans cette situation présence d’un taux élevé d’anticorps anti-M. leprae chez les individus en consommant plusieurs fois par semaine.

D’autres animaux apparaissent comme des hébergeurs fortuits : écureuil roux de certaines îles britanniques, chimpanzés de Côte d’Ivoire ou de Guinée Bissau, ces deux espèces infectées par des souches anciennes « moyenâgeuses » de M. leprae, peut-être via (uniquement en ce qui concerne les chimpanzés) un autre hôte intermédiaire.

Enfin, l’identification récente de M. leprae au sein d’amibes, dans lesquelles le germe peut persister plusieurs mois, seraient susceptibles de servir de support à un réservoir « tellurique » du germe, à rapprocher de la mise en évidence d’ADN de M. leprae dans le sol de l’environnement de maisons de patients malades de la lèpre (forme lépromateuse) au Bangladesh, de terriers de tatous au Surinam et de l’environnement d’écureuils roux des îles britanniques.

  • #0065/ILCABS 699. Spencer JSS. News hosts and new places in the environment for M. leprae : implications for new source of infection.
  • Voir aussi pour mémoire :Wheat WH et al. Long-term survival and virulence of Mycobacterium leprae in amoebal cysts. PLoS Negl Trop Dis 2014 DOI: 10.1371/journal.pntd.0003405
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Diplôme d’Université de « médecine de la diversité » : les inscriptions sont ouvertes (année 2022-2023)

Objectif de l’enseignement : La prise en charge médicale des personnes d’origine non-européenne risque de souffrir d’une méconnaissance par les médecins de certains déterminants de santé pouvant être considérés comme inhabituels dans un contexte européen traditionnel, qu’il s’agisse de déterminants génétiques (prédispositions à certaines maladies, pharmacogénétique), géographiques (exposition possible à certains agents pathogènes) ou d’ordre socioéconomique ou culturel (relation au système de soins, expression inhabituelle de certains symptômes). Des conséquences négatives sur la qualité des soins peuvent en résulter. La formation dispensée dans ce D.U. a pour objectif d’améliorer les compétences des médecins dans ces domaines, de façon à ce que les praticiens puissent intégrer dans leur pratique médicale générale, lorsque cela est pertinent, une prise en compte de la diversité des origines, et vise en définitive à une universalité de la qualité des soins.

Contenu de l’enseignement : celui-ci est dispensé en cinq modules : Module 1 : Approche de la problématique par les sciences humaines ; Module 2 : Influence du phénotype : l’exemple de la dermatologie ; Module 3 : Spécialités d’organes et de systèmes : les particularités à connaître ; Module 4 : Influence du milieu : grands ensembles régionaux d’intérêt sanitaire ; Module 5 : Méthodologies d’études et d’enseignement.

Tous renseignements complémentaires disponibles sur le site de l’Université de Strasbourg

http://unistramed.u-strasbg.fr/var/ezwebin_site/storage/original/application/5e88cece7839946df0f6748e2594c634.pdf

Mise en avant

En avant-première…

L’éditorial du prochain numéro du BALLF

La lèpre n’est pas une maladie du passé… même en Europe !

La tenue depuis maintenant 3 ans d’une réunion mensuelle de concertation pluridisciplinaire (RCP), organisée par le CNR MyRMA* et portant sur les cas de lèpre diagnostiqués en France métropolitaine, met en évidence deux points importants.

Le premier est que des cas de lèpre sont encore régulièrement diagnostiqués en France hexagonale (la totalité chez des personnes issues de zones d’endémie habituelles). Si le caractère facultatif du recours à la RCP interdit d’avancer des chiffres d’incidence qui soient fiables, l’alimentation constante des demandes d’avis suggère qu’un recensement systématique des cas ne serait pas inutile. Ceci pose la question de la déclaration de cette maladie auprès des instances sanitaires, qui n’est pas obligatoire en France mais qui pourrait se faire également sous la forme d’un registre, ne serait-ce que pour standardiser une prise en charge qui apparaît peu maitrisée par les non-spécialistes.

Le second point remarquable lors de ces réunions est la fréquence toute particulière des demandes d’avis pour la prise en charge d’états réactionnels. La complexité de nombreux cas discutés montre qu’une approche simple, telle que suggérée par la plupart des textes de référence actuels, ne suffit pas toujours. Clairement, les états réactionnels récidivants ou les plus sévères d’entre eux manquent d’un référentiel. La disparition annoncée de l’expertise dans le domaine de la lèpre est un péril qui ne peut être ignoré, et qui risque de rendre à l’avenir ces situations de plus en plus problématiques.

Clairement, la recherche sur la prise en charge des états réactionnels devrait être une priorité.

* Centre national de référence des mycobactéries et de la résistance des mycobactéries aux antituberculeux, https://cnrmyrma.fr

Mise en avant

Implications du Coronavirus disease 2019 (COVID-19) sur la prise en charge de la lèpre

Il ne faudrait pas que la redoutable pandémie au coronavirus SARS-CoV-2, responsable du tableau parfois gravissime désigné sous le nom de coronavirus disease 2019 (COVID-19), compromette significativement les efforts de lutte contre la lèpre. Cependant, des efforts d’adaptation des pratiques s’avèrent nécessaires.

Aussi, le Dr Christian Johnson, Président de l’association des léprologues de langue française (ALLF), souhaite-t-il diffuser un message émis par l’OMS, ILEP et Global partnership for Zero leprosy, ainsi qu’un autre issu de la Société brésilienne de lutte contre la maladie de Hansen.

La Rédaction

COVID-19 et lèpre : les recommandations de l’OMS, ILEP et Global partnership for Zero Leprosy

Conseils sur la lèpre et le COVID-19

Observations générales
➢  Les principales mesures préventives sont le lavage des mains à l’eau et au savon et l’éloignement social

➢  Il est important de suivre les conseils du gouvernement de votre pays concernant les voyages, le travail et les réunions sociales

➢  Toute personne présentant des symptômes respiratoires doit rester à la maison et téléphoner pour des conseils de santé

➢  Actuellement, rien n’indique une interaction spécifique entre la lèpre et COVID-19. 

Diagnostic et prise en charge clinique des malades de la lèpre
➢  L’OMS recommande que les programmes communautaires et les activités de dépistage soient reportées jusqu’à nouvel ordre; cela comprend le traçage des contacts et la chimioprophylaxie.

➢  Les soins dispensés aux patients dans les centres de santé, y compris le diagnostic et la prise en charge des cas, doivent continuer, en accordant une attention particulière au lavage des mains et à l’utilisation de masques faciaux, par le personnel de santé et les patients.  Les médicaments de poly-chimiothérapie (PCT) peuvent être fournis pour 2 ou 3 mois, afin de réduire la fréquentation du centre de santé.

➢  Les interventions non urgentes telles que la chirurgie reconstructive peuvent être reportées.

➢  L’évaluation de la fonction nerveuse doit continuer tous les trois mois pour les patients sous PCT, afin de réduire le risque de handicap futur. Le traitement des réactions doit également se poursuivre. 

➢  Des stéroïdes (prednisolone) doivent être administrés aux personnes affectées par la lèpre lorsqu’il existe une indication pour traiter la névrite. Les stéroïdes sont des médicaments immunosuppresseurs et peuvent donc augmenter la sensibilité au COVID-19, en particulier lors de leur utilisation pendant plusieurs années pour des maladies chroniques, telles que la polyarthrite rhumatoïde. Cet effet est lié à la dose et à la durée des stéroïdes administrés, de sorte que le cours typique de 20 semaines de prednisolone administré dans la lèpre est considéré d’avoir un risque minimal. Toute personne souffrant de toux devrait normalement être examinée pour la tuberculose avant de commencer les stéroïdes, donc, de même, le traitement aux stéroïdes peut être retardé de 2-3 semaines chez toute personne présentant des symptômes suggérant COVID-19. Quelques patients avec un ENL ont besoin de stéroïdes pendant une période plus longue; dans ces cas difficiles, les bénéfices des stéroïdes l’emportent généralement sur la faible augmentation du risque d’acquérir COVID-19.

➢  Si possible, il faut contacter les patients sous corticothérapie par téléphone ou via les réseaux sociaux pour s’assurer qu’ils prennent toutes les précautions possibles contre COVID-19.

Aspects de la lèpre liés à la santé publique lors de la pandémie de COVID-19
En cas d’épidémie ou pandémie, les pauvres, y compris les personnes atteintes de la lèpre, sont généralement affectées de manière disproportionnée. Les mesures qui aident à contrôler une pandémie, telles que la restriction des déplacements et la fermeture des lieux de travail, ont généralement un impact grave sur les groupes vulnérables. Elles peuvent également provoquer des troubles sociaux et entraîner une perte de revenus pour les individus et les familles.

➢  Une attention particulière devrait être accordée aux personnes vulnérables dans la communication sur les mesures recommandées par le gouvernement pour atténuer le risque de COVID-19. Un effort doit être fait pour atteindre les personnes touchées par la lèpre en utilisant plusieurs canaux médiatiques tels que téléphone portable, radio, brochures et affiches. 

➢  Il est important d’assurer la disponibilité de l’eau potable, surtout dans cette période, pour garantir la mise en œuvre des mesures préventives appropriées pour les malades et leurs proches. L’accès au service de santé doit être garanti de manière équitable à tous les patients dans la mesure du possible.

➢  Il est essentiel que les stocks de PCT soient correctement gérés, que la distribution des médicaments PCT se poursuive et que les commandes de PCT passées à temps. 

➢  Il faut éviter toutes les consultations et admissions non urgentes dans les établissements qui accueillent et admettent les patients COVID-19 afin de minimiser le risque pour les personnes affectées par la lèpre de devenir infectées. Des soins à domicile ou en milieu communautaire seraient alors préférés.

Services aux personnes en situation de handicap et / ou confrontées aux conséquences psychosociales de la lèpre
Les personnes touchées par la lèpre, en particulier celles souffrant de handicaps liés à la lèpre, peuvent être stigmatisées, conduisant à l’exclusion sociale et au mauvais bien-être mental. L’exclusion sociale aggrave souvent la pauvreté, les inégalités sociales et autres vulnérabilités existantes. Une proportion substantielle de personnes touchées souffrent de problèmes de santé mentale courants, tels que la dépression et l’anxiété. Lorsque de tels services sont disponibles, les personnes touchées peuvent être aidées par des services de réadaptation socio-économique, des groupes d’auto-assistance ou d’auto-soins, des conseils par les pairs et des services de santé mentale communautaires. Il s’agit souvent de réunions en groupe et / ou de contacts étroits et en face à face avec des pairs ou des soignants.

Les principales mesures de contrôle de COVID-19 comme l’éloignement social, l’auto-isolement et l’interdiction de se réunir en groupe interfèrent directement avec les services et interventions cidessus énumérées. Cette situation peut affecter directement les moyens de subsistance des personnes touchées, leur capacité à mener de façon efficace des activités de prévention des incapacités de même que les activités visant à renforcer leur résilience et à surmonter les problèmes de santé mentale. Elles peuvent également augmenter l’exclusion sociale et la solitude, tandis que la peur d’une infection au COVID-19 peut aggraver l’anxiété et la dépression.

Interventions recommandées pour atténuer les problèmes ci-dessus:

➢  Sensibiliser les agents de santé, les services sociaux et les autorités publiques aux problèmes psychosociaux auxquels les personnes touchées par la lèpre peuvent être confrontées et aux façons dont les mesures de contrôle COVID-19 peuvent aggraver ces problèmes.

➢  Faire un plaidoyer auprès des autorités pour permettre au personnel de santé et des services sociaux sélectionnés, y compris des pairs conseillers, de rendre visite aux personnes ayant des problèmes connus en raison de handicaps, de stigmatisation, d’anxiété ou de dépression.

➢  Essayez d’assurer qu’une ligne d’assistance téléphonique soit disponible pour que les personnes concernées puissent appeler lorsqu’elles rencontrent des problèmes ou simplement pour parler et / ou fournir des informations essentielles sur COVID-19 et les moyens de se protéger contre l’infection. Plusieurs pays ont déjà une ligne d’assistance téléphonique pour le COVID-19. Lorsque ce service existe, le personnel du centre d’appels doit être informé des besoins des personnes vulnérables, y compris les malades de la lèpre. Lorsqu’il existe des services d’assistance téléphonique spécifiques pour les personnes affectées par la lèpre, ceux qui répondent aux appels doivent savoir quels conseils donner concernant le COVID-19.

➢  Communiquez avec les personnes ayant des problèmes connus par téléphone ou SMS pour les informer qu’on se soucie de leur situation et pour leur fournir des informations essentielles sur le COVID-19 et les moyens de se protéger contre l’infection.

➢  Mettre en place une plateforme de réseaux sociaux, par ex. un groupe Facebook ou WhatsApp où les gens peuvent trouver des informations sur la lèpre et le COVID-19 et où ils peuvent se contacter ou se soutenir. Ces groupes peuvent également être utilisés pour fournir des informations essentielles sur la façon de se protéger soi-même de l’infection.

➢  Les organisations gouvernementales et non gouvernementales devraient faciliter l’accès aux droits sociaux, y compris les pensions ou la fourniture de produits alimentaires de base, aux personnes en situation de handicaps dû à la lèpre et à d’autres groupes vulnérables, tels que les personnes âgées.

Covid-19 et lèpre : les recommandations de société brésilienne de la maladie de Hansen

 Bonjour à tous,

En cette période d’épidémie COVID-19, nous devons nous assurer de la continuité des services lèpres dans les programmes nationaux. Nous vous transmettons les lignes directrices de la société brésilienne de la maladie de Hansen que chaque programme national pourra adapter à son contexte.

Dr Roch Christian JOHNSON (Président de l’ALLF)

LIGNES DIRECTRICES À L’INTENTION DES MÉDECINS DE LA SOCIÉTÉ BRÉSILIENNE DE LA MALADIE DE HANSEN (SBH) SUR LA POSSIBILITÉ DE CO-INFECTION LEPRE ET COVID-19

 • Considérant l’urgence qui s’est installée en raison de la pandémie COVID-19

• Considérant les progrès jour après jour des études et des articles sur le thème, qui permettent d’identifier des sous-groupes de population plus vulnérables au développement de formes sévères du COVID-19;

 • Considérant qu’il existe des patients sous traitement de la lèpre qui répondent à ces mêmes critères et, par conséquent, nécessitent plus d’attention, en particulier le nombre important de patients âgés atteints de lèpre,

 La Société brésilienne de la maladie de Hansen clarifie et recommande que :

1. Certains facteurs de risque de développement de la forme grave d’infection au COVID-19 (syndrome de détresse respiratoire aiguë), ont été identifiés. Parmi eux, l’âge du patient et les comorbidités telles que le diabète sucré et l’hypertension artérielle systémique (1), ce dernier surtout chez les patients qui sont traités à l’aide d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (2) (note de la rédaction: ce dernier point est controversé). De plus, les patients présentant d’autres altérations biologiques, telles que la neutrophilie et des niveaux élevés de lactate déshydrogénase (LDH),  ont également montré un risque plus élevé de développer des formes sévères de COVID-19 (3).

 2. Les patients atteints de lèpre BB, BL ou LL peuvent avoir des niveaux élevés de LDH et peuvent développer une neutrophilie sur une réaction de type 2, un érythème noueux lépreux (4,5). Par conséquent, il faut leur conseiller de redoubler les mesures de précaution concernant la possibilité d’infection par COVID19. Ces précautions sont les mêmes que celles destinées à la population générale, y compris l’isolement en raison de la pandémie elle-même (et non du fait de la lèpre), sauf indication contraire.

 3. Pour les patients sous traitement de la lèpre utilisant uniquement des antibiotiques de la PCT, les directives de prévention du COVID-19 sont les mêmes que pour la population générale. Il n’y a pas de changement à prévoir concernant le traitement de la lèpre, qui devrait normalement être maintenu. Les programmes nationaux et les centres de traitement santé devraient évaluer les possibilités de fournir la PCT et les médicaments contre les réactions pendant plus d’un mois, en évitant les retours mensuels de patients bien stabilisés. Cependant, pour la faisabilité de cette recommandation, l’articulation avec le coordinateur National et le ministère de la Santé est indispensable, afin de mettre à disposition une quantité supplémentaire de médicaments, afin d’éviter toute pénurie.

 4. Pour les personnes affectées par la lèpre qui suivent un traitement pour des réactions(réaction d’inversion, érythème noueux lépreux, névrite), pour lesquels des médicaments pouvant conduire à une immunosuppression sont utilisés (voir figure 1 sur les critères d’immunosuppression), il convient de considérer que la prednisone est immunosuppressive à partir de la dose  > ou = à 10 mg par jour, ou d’une dose cumulée totale  > ou = à 700 mg. Par conséquent, étant donné que la plupart des patients atteints de réactions lépreuses nécessitent de longues périodes de traitement avec des doses variables de prednisone, ils doivent être considérés comme immunodéprimés et, par conséquent, plus vulnérables à toute infection, dont le coronavirus (6).

5. Les études publiées jusqu’à présent, dont une sur plus de 1.000 cas d’infection à COVID-19, n’ont pas détecté de patients coinfectés par la lèpre dans les formes graves de la maladie. Il n’y a toujours pas de données spécifiques sur COVID-19 chez les patients atteints de maladies auto-immunes ou d’immunosuppression. Cependant, une plus grande attention devrait être assuréepour ces patients (3,10,11).

 6. Les personnes affectées par la lèpre  peuvent présenter des lésions hépatiques, soit en raison de la maladie elle-même, soit de l’action des médicaments utilisés dans son traitement. Les patients atteints de la forme sévère de COVID-19 développent également de graves lésions hépatiques. Ainsi, l’attention doit également être renforcée en cas d’infection concomitante (12).

 7. Les situations spéciales, telles que la coinfection de la lèpre avec la tuberculose ou le VIH, ainsi que lèpre et la grossesse en cas de superposition présumée de COVID-19, devraient être analysées attentivement, car les conséquences sont imprévisibles et peuvent se révéler graves.

 8. En ce qui concerne les consultations externes pendant la pandémie de COVID-19, la Société brésilienne de la maladie de Hansen recommande que les consultations soient réduites au minimum nécessaire, visant à protéger en particulier les patients ayant des réactions qui ont toujours besoin de soins spécialisés. Le service et les professionnels de santé doivent suivre les directives du ministère de la Santé, avec l’utilisation d’équipements de protection individuelle (EPI), tels que des masques, le lavage des mains à l’eau et au savon, les frictions au gel hydroalcoolique pour l’asepsie des mains. il faut aussi désinfecter les surfaces du mobilier des services de soins.

9. Les réactions sont des événements aigus qui nécessitent des soins spécialisés et en aucun cas la fourniture de soins médicaux ne doit être interrompue chez ces patients, qui peuvent avoir besoin d’assistance et aboutiront à la recherche de services d’urgence malgré la pandémie du COVID-19.

Société brésilienne de la maladie de Hansen, Brésil, 19 mars 2020

 Figure 1.  Critères  d'immunosuppression  

 1. Neutropénie - diminution du nombre total de neutrophiles.
 2. Tumeurs hématologiques, avec ou sans chimiothérapie.  
 3. Infection par le VIH  avec des cellules de numération des CD4 <200 / mm3. 
 4. Troubles spléniques (troubles anatomiques ou fonctionnels). 
 5. Patients transplantés  sous traitement immunosuppresseur.
 6. Traitement antinéoplasique au cours des 30 derniers jours. 
 7. Patient sous corticostéroïdes: prednisone, dexaméthasone, hydrocortisone et autres.  
 8. Patient traité avec tout autre médicament immunosuppresseur. 
 9. Patients atteints de  maladies auto-immunes. 
10. Patients présentant des immunodéficiences congénitales. 
Références bibliographiques

1. Wu C, Chen X, Cai Y,Xia J, Zhou X, Xu S et al. Facteurs de risque associés au syndrome de détresse respiratoire aiguë et à la mort chez les patients atteints de pneumonie à coronavirus 2019 à Wuhan, en Chine.JAMA Médecine interne. 2020. 
2. Fang L, Karakiulakis G Roth M. Les patients souffrant d'hypertension et de diabète sucré présentent-ils un risque accru d'infection au COVID-19? La médecine respiratoire Lancet. 2020. 
3. Zhou F, Yu T, Du R, Fan G, Liu Y, Liu Z, et al. Évolution clinique et facteurs de risque de mortalité des patients hospitalisés adultes atteints de COVID-19 à Wuhan, en Chine:une étude de cohorte rétrospective. Lancet (Londres, Angleterre). 2020.
4. Agarwal DP, Srivastava LM, Goedde HW, Rohde R. Etudes biochimiques, immunologiques et génétiques dans la lèpre.I. Changements dans les isoenzymes de lactate déshydrogénase sérique,l'activité de la créatine phosphokinase et de l'aldolase dans différentes formes de lèpre. Tropenmedizin und Parasitologie. 1975; 26 (2):207-11. 
5. Carneiro S, Nakasato FK, Balassiano V, Torres F, par Noronha Neta MI, Gomes MK, et al. Réaction lépromateuse de type II: aspects cliniques et de laboratoire. Skinmed. 2019; 17 (4):261-5.
6. Stuck AE, Minder CE, Frey FJ. Risque de complications infectieuses chez les patients prenant des glucocorticostéroïdes. Rev Infect Dis. 1989; 11 (6): 954–963. 
7. Majumder S, Sreedhara SR, Banerjee S, Chatterjee S. La signalisation TNF alpha contemple la saga thalidomide : une revue du rôle mécaniste de la signalisation TNF-alpha sous thalidomide. Thèmes actuels en chimie médicinale.2012; 12 (13): 1456-67. 
8. Mankikian J, Lioger B, Diot E, D'Halluin P, Lissandre S, Marchand Adam S, et al. Toxicité pulmonaire associée à l'utilisation du lénalidomide: rapport de cas de syndrome de détresse respiratoire aiguë d'apparition tardive et revue de la littérature.Coeur et poumon: le journal des soins intensifs. 2014;43 (2): 120-3.
9. Thornburg A, Abonour R, Smith P, Knox K, Twigg HL, 3e. Syndrome de type pneumonie d'hypersensibilité associé à l'utilisation du lénalidomide. Poitrine. 2007; 131 (5): 1572-4. 
10. Guan WJ, Ni ZY, Hu Y, Liang WH ou CQ, He JX, et al. Caractéristiques cliniques de la maladie à coronavirus 2019 en Chine. 
New England Journal of Medicine. 2020; 10.1056 / NEJMoa2002032. doi: 10.1056/NEJMoa2002032 
11. Huang C, Wang Y, Li X,Ren L, Zhao J, Hu Y, et al. Caractéristiques cliniques des patients infectés par le nouveau coronavirus 2019 à Wuhan, en Chine. (Londres, Angleterre).2020; 395 (10223): 497-506. 
12. Xu L, Liu J, Lu M,Yang D, Zheng X. Lésion hépatique lors d'infections à coronavirus humain hautement pathogènes [publié en ligne avant l'impression, 14 mars 2020]. Liver Int.2020; 10.1111 / liv.14435. doi: 10.1111 / liv.14435. 

Mise en avant

Nouvelles de Manille

Le vingtième International Leprosy Congress s’est tenu à Manille (Philippines) du 11 au 13 septembre 2019.

Dans les semaines qui viennent, cette page sera régulièrement alimentée par des informations recueillies par les membres de l’ALLF présents lors de cette importante manifestation.

A très bientôt, donc ! (15/09/2019)

Les inhibiteurs de la phosphodiestérase 4, traitement d’avenir des réactions de type 2 récalcitrantes ?

Plusieurs présentations suggéraient un possible intérêt des inhibiteurs de la phosphodiestérase 4 au cours des réactions de type 2 (érythème noueux lépreux, ENL) : le traitement par aprémilast de 5 patients atteints d’ENL chroniques corticodépendants, avec un résultat semblant favorable (P-202); le protocole d’un essai plus ambitieux de phase 2 du CC-11050 (autre inhibiteurs de la phosphodiestérase 4) au cours de l’ENL a également été présenté (O-042).

Les inhibiteurs de la phosphodiestérase 4 appartiennent à une nouvelle classe de traitements « immunomodulateurs » prometteuse, déjà utilisée avec succès au cours de certains psoriasis sévères ou de la maladie de Behçet. Cependant, les données d’efficacité et de tolérance au cours des réactions lépreuses de type 2 sont encore très préliminaires, et surtout le coût très élevé de cette classe médicamenteuse les éloigne a priori pour longtemps d’un rôle de panacée au cours de l’ENL.

(MY Grauwin et A. Mahé, le 27/02/2020)

 P-202. SMALL MOLECULES IN LEPROSY:  APREMILAST AS A TREATMENT OPTION FOR CHRONIC RECURRENT ERYTHEMA NODOSUM LEPROSUM. T Narang, S Dogra, A Kaushik 
 O-042. A SINGLE CENTER, OPEN LABEL PILOT STUDY TO EVALUATE THE SAFETY AND EFFICACY OF CC-11050, A NOVEL PHOSPHODIESTERASE 4 INHIBITOR, IN NEPALESE PATIENTS WITH ERYTHEMA NODOSUM LEPROSUM. M. Shah1, D.A. Hagge, D. RSJB Rana, K.D. Neupane, K.Arakawa, D.M. Scollard, P. Maharjan, V. Khetani, I.B. Napit 

L’analyse spatiale : une approche originale et prometteuse des foyers hyperendémiques de lèpre

Des logiciels relativement simples et accessibles permettent désormais de relier les cas de lèpre selon leur proximité spatiale, définissant dans certaines zones géographiques à endémicité élevée des foyers de cas groupés (clusters) ayant une proximité spatiale plus élevée que ne le voudrait le hasard.

Les données tirées de ces études pourraient utilement être mises à profit pour identifier des zones/sujets particulièrement à risque de contamination par le bacille de la lèpre, permettant un dépistage actif orienté, voire à même de justifier un traitement prophylactique « de masse » appliqué à tous les habitants d’une zone (blanket campaign). Un point technique important à déterminer reste cependant la distance définissant en pratique la proximité géographique idéale des cas (25m dans certaines études, 500m dans d’autres).

(A. Mahé, le 19/01/2020)

 O-018. CLUSTER IDENTIFICATION AND THE IMPLICATIONS FOR A BLANKET APPROACH IN CHEMOPROPHYLAXIS FOR LEPROSY IN INDIA. A.T. Taal, J.G. Barreto, A. Garg, W.H. van Brakel, J.H. Richardus
 O-080. CLUSTER OF RECENT LEPROSY TRANSMISSION IN A FORMER LEPROSARIUM IN BRAZIL. Josafá Gonçalves Barreto, Bárbara Lopes Paiva, Francisco Eguinaldo de Albuquerque Félix Junior, Pedro Igor Oliveira Carvalho, Moises Batista da Silva, Claudio Guedes Salgado.
 O-266. SPATIAL EPIDEMIOLOGY OF LEPROSY IN A HYPERENDEMIC CITY OF THE BRAZILIAN AMAZON REGION: CLUSTERING OF DISEASE AND POVERTY. Josafá Gonçalves Barreto, Julio Moreira Soares Neto, Moises Batista da Silva, Claudio Guedes Salgado
 O-329. STRONG DEGREES OF SPATIAL CLUSTERING OF LEPROSY AT SUB-VILLAGE LEVEL ON THE COMOROS. Nimer Ortuno-Gutierrez, Abdallah Baco, Younoussa Assoumani, Aboubacar Mzembaba,Zahara Salim, Mohamed Amidy, Saverio 
 Grillone, Jan Hendrik Richardus, Sofie Braet,Bouke C. de Jong, Epco Hasker 
Image tirée de la présentation O-080: CLUSTER OF RECENT LEPROSY TRANSMISSION IN A FORMER LEPROSARIUM IN BRAZIL (Josafá Gonçalves Barreto et al.)

Une étude chez la souris en faveur de l’administration prophylactique de plusieurs doses d’antibiotiques plutôt que d’une seule

L’objectif de cette étude était de comparer l’efficacité de différents protocoles de prophylaxie post-exposition chez des souris immunodéprimées athymiques. Dans la première étude, des lots de souris ont reçu, deux mois après l’inoculation de BH, différentes prises uniques d’antibiotique(s): une dose de rifampicine (RMP), une dose de ROM, une dose de l’association rifapentine/minocycline/moxifloxacine (MOXI). Des prélèvements à la recherche de bacilles viables chez les souris ont été effectués à 2, 4 et 6 mois en utilisant une technique PCR particulièrement sensible (RLEP PCR). Dans une seconde étude, les mêmes composés étaient administrés 1 jour, 1 mois ou 2 mois après l’inoculation. Dans une troisième étude, les souris recevaient 3 doses mensuelles de différentes associations antibiotiques (RMP + MOXI, RMP + clarithromycine, rifapentine + MOXI, rifapentine + clarithromycine ).

Les résultats montraient clairement une plus grande efficacité des schémas comportant une répétition des prises antibiotiques. Ceci suggère que des schémas prophylactiques comportant plusieurs doses médicamenteuses pourraient être indiqués chez des contacts hautement susceptibles, comme les contacts familiaux domiciliaires dont on sait qu’ils répondent moins bien à la RMP en DU.

(A.Mahé, le 11/01/2020)

O-292.THE EFFICACY OF DIFFERENT CHEMOPROPHYLAXIS REGIMENS IN A HIGHLY SUSCEPTIBLE SUBCLINICAL MODEL OF LEPROSY. S.M. Lenz, J.H. Collins, N.A. Ray, A.T. Deming, R. Lahiri, D.A. Hagge, and L.B. Adams 

BCG + RMP DU en prophylaxie : des résultats décevants

Les résultats du projet très attendu MALTALEP ont été présentés en avant-première. Rappelons que ce projet visait à tester l’effet préventif d’une dose unique (DU) de rifampicine (RMP) lorsqu’associée à une vaccination contemporaine par le BCG, vaccin connu de longue date comme ayant un certain effet préventif propre si pratiqué dans la petite enfance, effet de plus apparemment additif à la prise de RMP en DU lors du projet COLEP.  Une étude brésilienne plus ancienne avait de plus suggéré un effet protecteur du BCG lorsqu’effectué chez des contacts proches de cas de lèpre récemment diagnostiqués, avec cependant une survenue étonnamment précoce (dans les 10 premiers mois) des cas non évités.

L’étude consistait donc ici en la comparaison de deux procédures chez des contacts domiciliaires (n = 14.988) de nouveaux cas de lèpre (n = 1.552) : vaccination par BCG seule vs vaccination par BCG complétée par une prise de RMP DU administrée 8 à 12 semaines après la vaccination.

Au final, le nombre de nouveaux cas de lèpre n’était pas significativement différent entre les deux groupes à 1 an et à 2 ans. Encore une fois, les nouveaux cas de lèpre semblaient plus de type PB dans le bras BCG seul, et étaient volontiers de survenue précoce (diagnostic pour 34% d’entre eux entre 8 et 12 semaines après la vaccination). Il est à noter que certains de ces cas précoces présentaient une atteinte névritique.

En définitive, cet essai apparaît plutôt décevant. Bien sûr, on peut toujours évoquer un certain effet préventif du BCG, cependant plutôt ambigu puisque semblant s’accompagner, d’une façon confirmée par rapport à l’étude brésilienne, d’une augmentation précoce du nombre de cas PB (par stimulation de lymphocytes T-helper 1 ?), parfois sur un mode névritique potentiellement délétère. Les auteurs suggèrent de tester l’administration plus précoce de RMP après la vaccination, l’administration simultanée ou précédant le BCG étant exclue pour des raisons bactériologiques, la RMP inhibant le BCG qui est un vaccin vivant.

(A. Mahé, le 31/12/2019)

0-O16. EFFECTIVENESS OF SINGLE DOSE RIFAMPICIN GIVEN AFTER BCG VACCINATION IN PREVENTING LEPROSY IN CLOSE CONTACTS OF PATIENTS WITH NEWLY DIAGNOSED LEPROSY: A CLUSTER RANDOMIZED CONTROLLED TRIAL 
R.A. Richardus, K. Alam, K. Kundu, J. Chandra Roy, T. Jafar, A.S. Chowdhury, D. Kahn, D. Nieboer, R. Faber, C. R. Butlin, A. Geluk and J.H. Richardus   
Manille (centre ville)

Le méthotrexate : dans les réactions de type 1 également ?

Le méthotrexate était décidément à l’honneur à Manille, puisque non seulement le protocole d’une étude randomisée visant à déterminer son efficacité dans les réactions de type 2 a été présenté (voir précédemment), mais, en outre, les résultats d’une étude ouverte où ce composé a été utilisé lors de réactions de type cette fois 1 (reverse reaction) ont fait l’objet d’une communication orale.

Trente patients présentant une réaction de type 1 traitée depuis moins de 6 mois par une corticothérapie orale ont été randomisés en deux groupes : un groupe ne recevant qu’une corticothérapie orale décroissante sur 24 semaines selon un schéma classique, l’autre groupe recevant du méthotrexate hebdomadaire (5 à 7,5 mg par semaine) associé à une corticothérapie orale à posologie réduite et rapidement décroissante (sur 4 semaines). A 6 mois, les résultats étaient en faveur d’une efficacité plus rapide dans le groupe méthotrexate. Les données présentées ne permettaient pas d’évaluer le risque de rechute.

Il est à signaler que l’efficacité du méthotrexate dans les réactions de type 1 a déjà fait l’objet de publications précédentes (Clin Infect Dis. 2007 Jul 1;45(1):e7-9. Methotrexate treatment for type 1 (reversal) leprosy reactions. Biosca G, Casallo S, López-Vélez R).

Au final, il reste de nombreuses inconnues entourant l’usage de ce médicament au cours de la lèpre (dose hebdomadaire optimale, qui semblait ici inhabituellement basse par rapport aux indications classiques de ce composé ? Efficacité lors des réactions chroniques ? Gestion de ce traitement potentiellement toxique sur le terrain ? Place dans la stratégie de prise en charge des réactions de type 2 ? De type 1 ?…), mais, d’ores et déjà, les données disponibles nous semblent suffisantes pour proposer ce composé lors de situations difficiles (comme, par exemple, la corticodépendance à fortes doses de réactions chroniques).

(A. Mahé, le 26/12/2019)

O-011. A RANDOMIZED CONTROLLED ASSESSOR-BLINDED TRIAL OF METHOTREXATE COMPARED TO PREDNISONE IN THE MANAGEMENT OF HANSEN’S DISEASE PATIENTS WITH TYPE 1 REACTION IN A TERTIARY GOVERNMENT HOSPITAL. P.O. Ramirez, L.L. Laconico-Tumalad, M.A. Lavadia 

L’étude de foyers hyperendémiques de lèpre est porteuse d’enseignements

Une étude a porté sur une île précédemment site d’une ancienne léproserie (en Nouvelle-Calédonie), île où l’incidence de la lèpre atteint 16/10.000. L’ensemble des habitants de cette île (843 habitants) a été ciblé pour réaliser un examen clinique ainsi que des prélèvements cutanéo-muqueux (PCR sur lobes des oreilles, mucus nasal) et sanguins (sérologie PGL-1). Sur les 621 personnes ayant finalement pu être incluses, 8 cas probables de lèpre active ont été identifiés (dont 5 chez des sujets de moins de 18 ans). La prise en compte de l’ensemble des résultats biologiques et cliniques (positivité sérologie PGL-1, PCR positive, cas de lèpre déjà connus ou dépistés) suggérait que 25% de la population étudiée avait eu un contact avéré avec le BH. Des prélèvements effectués au nveau de réservoirs environnementaux potentiels (cimetière d’anciens lépreux,…) étaient négatifs.

L’étude de foyers hyperendémiques de lèpre tels que celui-ci, outre l’intérêt pratique évident en termes de dépistage de la maladie dans de tels contextes, lesquels ne sont pas exceptionnels, est potentiellement porteuse de renseignements importants sur la transmission de la maladie.

(A. Mahé, le 22/12/2019)

O-200. Leprosy screening campaign on Belep island (New-Caledonia). V. Baron, C. Forfait, E. Cambau, E. Klement, JB.Gaumery, A. Pfannstiel, J. Colot, C. Cazorla, B. Cauchoix, JP. Grangeon 
Manille, centre ville

Mal perforant plantaire : une bonne semelle + une bonne chaussure = une bonne cicatrisation !

Les progrès de la technique, les semelles, les fabrications en CAD, l’analyse de la marche profitent aux malades dans les centres de références évolués et bénéficiant de ces techniques. Une étude convaincante, portant sur des chaussures adaptées basées sur une semelle moulée sur le pied du malade, ainsi que cela est pratiqué dans de nombreux centres, a été présentée. Une bonne semelle, une bonne chaussure égalent une bonne cicatrisation, cela fait un peu slogan publicitaire, mais c’est cohérent !

(M.Y. Grauwin, 21/12/2019)

 0-129. Outcome study of podiatric appliances to heal plantar ulcer and to prevent recurrence. Santosh kumar Singh, Rajni Kant Singh, Lal Babu Singh, Fulchand Mahto 

La chimioprophylaxie : un nouvel outil pour le contrôle de la lèpre

P. Steinmann a présenté une intéressante synthèse sur la prophylaxie médicamenteuse de la lèpre. Les données les plus convaincantes concernant l’efficacité de ce type de mesure proviennent de l’étude COLEP laquelle, on le rappelle, a démontré une baisse de l’incidence de la lèpre de l’ordre de 57% dans l’entourage élargi de cas de lèpre ayant reçu une dose unique de rifampicine (Single Dose Rifampicin, SDR) (https://www.bmj.com/content/bmj/336/7647/761.full.pdf). Sur le long terme, il apparaît maintenant clairement que l’effet positif n’a porté que sur les 2 premières années, les courbes d’incidence des zones « traitement »  et « témoin » se rejoignant après 4 ans, cependant sans « rattrapage » des cas évités (https://www.lepra.org.uk/platforms/lepra/files/lr/Sept12/292.pdf).

Cependant, malgré l’avancée indiscutable que représente cette étude, beaucoup d’interrogations persistent. Il était ainsi manifeste que l’effet prophylactique était d’autant plus important que le sujet traité était géographiquement et génétiquement éloigné du cas index, ce qui étaye encore la notion que les contacts domiciliaires, surtout s’ils sont familiaux, sont les plus à risque de maladie. Pour (en particulier) cette raison, d’autres protocoles prophylactiques sont en cours d’étude : citons les projets PEOPLE (SDR administré à différentes catégories de contacts), PEP4LP, MALTALEP (BCG + SDR vs BCG seul), PEP++ (trois administrations à un mois d’intervalle combinant la RMP à divers composés : clarithromycine, moxifloxacine).

(A. Mahé, 01/12/2019)

Réactions, douleur neuropathique : le point en 2019

Une intéressante conférence plénière s’est tenue sur ces sujets étroitement liés.

En ce qui concerne les réactions, on prend acte de la publication par l’OMS de recommandations pour la prise en charge de ces états (https://www.who.int/lep/research/Reactions.pdf), mais, de prime abord, les choses semblent n’avoir guère évolué… Cependant, est-ce encore pour longtemps ? Un frémissement de la recherche semble en effet palpable.

A propos des réactions de type 1, les recommandations fondamentales ont été rappelées (D. Lockwood) : intérêt d’un dépistage précoce des réactions par formation des soignants et éducation des patients, place toujours prépondérante des corticoïdes administrés par voie orale, avec une relative standardisation de la posologie (30-40 mg/j) et de la durée disposant du meilleur rapport bénéfices/risques (20 semaines), absence d’intérêt d’un traitement préventif chez les sujets asymptomatiques, place encore réduite des alternatives thérapeutiques aux corticoïdes (ciclosporine, azathioprine).

En ce qui concerne les réactions de type 2, un constat voisin a tout d’abord été effectué (J. Darlong). Tout bien considéré, l’échelle de gravité (« ENL severity scale ») développée via ENLlist n’a guère d’intérêt que pour guider de façon standardisée le suivi des patients traités, tout particulièrement si c’est dans le cadre d’essais thérapeutiques. La morbidité considérable d’une corticothérapie orale prolongée lors des ENL chroniques et/ou récidivants, qui sont des situations non exceptionnelles, rend en fait particulièrement cruciales de nouvelles alternatives thérapeutiques, les solutions actuelles (thalidomide, clofazimine à forte dose, pentoxifylline, anti-TNF…) ayant montré leurs limites. En définitive, on ne peut clore ce chapitre sur l’ENL sans citer les espoirs raisonnables reposant sur certains nouveaux composés  prometteurs : inhibiteurs sélectifs de phophodiestérase 4 éventuellement, aux résultats encore extrêmement préliminaires, mais surtout méthotrexate, dont le coût bas et la relative facilité d’emploi en font un candidat alternatif sérieux, d’ores et déjà lors de la prise en charge de cas difficiles, mais surtout lors d’essais thérapeutiques dont on attend avec impatience les résultats…

Pour ce qui est de la douleur neuropathique (A. Rice), qui peut d’ailleurs être présente qu’il y ait ou non réaction, la reconnaissance en séance plénière de ce paramètre représente déjà une avancée indiscutable. Cependant, ceci n’est peut-être pas encore assez pris en compte lors des soins de chaque patient potentiellement concerné, du fait d‘une certaine tendance historique à la négligence de la douleur en tant que telle. Il convient de combattre cette inertie. En effet, en dehors des douleurs réactionnelles dont le traitement est avant tout étiologique, de nombreuses solutions médicamenteuses spécifiques sont disponibles (duloxétine, amitriptylline, gabapentine et prégabaline, capsaïcine en topique…).

(A. Mahé, 15/11/2019)

Manille « by night »

Le méthotrexate dans l’ENL, une solution d’avenir ?

(MY Grauwin)

La prednisolone/prednisone est utilisée par tous les experts, notamment celle qui fait office de grande spécialiste de la réaction de type 2, Diana Lockwood et son groupe ENLIST (à noter que la posologie est souvent exprimée en dose fixe (« 40 mg/j »), alors qu’il serait plus logique de l’exprimer en mg/kg…). Toutefois, ce composé à d’importantes limites, en particulier lors des formes chroniques ou récidivantes d’ENL du fait des effets secondaires parfois gravissimes en rapport avec une corticothérapie orale prolongée. Un certain nombre de composés ont été testés en association ou en comparaison avec la prednisolone (pentoxifylline, clofazimine, cyclosporine et thalidomide notamment), avec parfois un réel intérêt (thalidomide, pentoxifylline), mais qui ne résolvent pas tous les problèmes ni toutes les situations (en particulier pour la thalidomide : neurotoxicité, malformations si grossesse, phlébites, AVC, passage par le sperme…). Le méthotrexate parait une nouvelle solution intéressante, qui pourrait être fiable pour un coût modique (peu d’effets secondaires à cette dose, peut être pris longtemps…).

ELNLIST a présenté la méthodologie d’un essai qui démarre prochainement, aucun malade n’ayant encore été inclus. L’essai comparera le méthotrexate 15-20mg/semaine/48 semaines + prednisolone 40mg/20 semaines, à la prednisolone seule 40mg/20 semaines.

ÉTUDE DU MÉTHOTREXATE ET DE LA PREDNISOLONE DANS LE LEPROSUM D'ERYTHÈME NODOSUM: UN PROTOCOLE D'ESSAI CLINIQUE RANDOMISÉB. de Barros1 *, SM Lambert1,2, BJ Rozario3, Ventes4, CR Butlin3, M. Shah5, J. Darlong6, VV Pai7, SN Doni2, DA Hagge5, JAC Nery4, K. Neupane5, Y. Listiawan 8, M. Alinda 8, A. Maghanoy9, PG Nicholls, DNJ Lockwood1, S. L. Walker1 ** au nom du groupe d’études Erythema Nodosum Leprosum International.

ENL score, un score de gravité de l’ENL

Le score avait déjà été présenté à Pékin, il est de nouveau présenté après mise en œuvre « sur le terrain ». Pas beaucoup de critiques à faire sur les items du score, 10 en tout (1 « douleur » sur une échelle analogique de 0 à 100 – 2 « fièvre » – 3 « nombre de nouures » – 4 « inflammation des nouures » – 5 « nombre de zones avec des nouures » – 6 « œdème mains, pieds et face » – 7 « douleurs osseuses » – 8 « arthrites » – 9 « adénopathies » – 10 « hypertrophies et douleurs à la palpation nerveuse »), et 4 grades croissants de gravité (0, 1, 2, et 3). Le score permet de suivre l’efficacité du traitement et de faire une courbe de suivi avec notamment la visualisation des rebonds, et de prendre les décisions thérapeutiques en conséquence. C’est plutôt intéressant et scientifique dans un centre de référence national avec des médecins et suffisamment de malades, surtout si de nombreux centres à travers le monde partagent leur expérience et disposent ainsi d’un outil commun.

(MY Grauwin)

UTILISATION DE L'ECHELLE DE GRAVITE ENLLIST EN ALERT LEPROSY CLINIC EN ETHIOPIE EN TANT QU'OUTIL POUR EVALUER LA REPONSE DU PATIENT AU TRAITEMENT. S. M. Lambert, S. D. Nigusse, Abeba Mitike, S. Walker (Département de recherche clinique - Faculté des maladies infectieuses et tropicales, École d'hygiène et de médecine tropicale de Londres, Londres (Royaume-Uni), Centre ALERT, Addis-Abeba (Éthiopie)

Cicatrisation : quelle place pour le PRP (« plasma enrichi en plaquettes ») ?

Sur la cicatrisation, on sait depuis longtemps que l’eau, le savon et le gras fonctionnent bien sur le terrain. Cependant, une étude du Népal suggère l’efficacité de l’application de leucocytes et plaquettes autologues obtenus après une centrifugation du sang du malade (« plasma enrichi en plaquettes ») dans les plaies chroniques. Il reste à déterminer par des études complémentaires l’intérêt sur le terrain de cette pratique, que sa technicité (nécessité d’une centrifugeuse à portée de main) limite à certains centres de référence.

(MY Grauwin et A Mahé)

APPLICATION DE FIBRINE ENRICHIE EN LEUCOCYTES ET PLAQUETTES AUTOLOGUES (L-PRF) DANS LES ULCERES TROPHIQUES DE LA LEPRE: ÉTUDE CLINIQUE À L'HÔPITAL ANANDABAN DU NÉPAL. I. B. Napit, D. Shrestha, R. K. Maharjan, D. Rana1, P. Sapkota1, J.R. Sharma, S. Dulal, S. Koirala, N. R. Pinto, D. A. Hagge

A la recherche de nouveaux marqueurs diagnostiques

Le Pr Geluk et son équipe (Pays-Bas) ont présenté leurs travaux visant à améliorer la performance diagnostique des examens sanguins dans la lèpre. L’idée est de combiner des examens sérologiques classiques (anti-PGL1) et des marqueurs de l’immunité T, afin notamment d’identifier, parmi les contacts, ceux étant les plus à risque de lèpre maladie ; et également, si possible, d’évaluer la réponse à un traitement prophylactique chez ces patients (en les quantifiant). En l’état actuel, si les techniques sérologiques selon la technologie « UCP » apparaissent aussi fiables et d’usage, notamment sur le terrain, plus facile que les classiques tests ELISA (prélèvement au doigt), les résultats restent préliminaires et semblent donc avoir a priori un intérêt surtout chez les patients multibacillaires ou chez les contacts. Rappelons que les tests type Quantiféron n’ont pas montré d’intérêt au cours de la lèpre (positivité fréquente chez les PB mais peu de spécificité en contexte d’endémie tuberculeuse élevée).

(A. Mahé)

FINGERSTICK TEST QUANTIFYING HUMORAL AND CELLULAR BIOMARKERS INDICATIVE FOR M. LEPRAE INFECTION. P.L.A.M. Corstjens, A. van Hooij, E.M. Tjon Kon Fat, K. Alam, L.B. Vrolijk, S. Dlamini, M. Batista da Silva, J.S. Spencer, C.G. Salgado, J.H. Richardus, C.L.M. van Hees, and A. Geluk 
Jeepneys (Manille)

Résistance bactérienne

La résistance de M. leprae aux différents antibiotiques utilisables dans la lèpre est une préoccupation majeure. Certains pays semblent plus particulièrement concernés, notamment pour ce qui est de la résistance à l’antilépreux majeur qu’est la rifampicine. Aussi les communications du Brésil concernant ce paramètre étaient-elles particulièrement attendues. Des résultats concernant la région de Para (Amazonie) ont ainsi été présentés. Une résistance (déterminée par typage génétique recherchant les drug resistance determining regions) était retrouvée dans 2,7% des cas (6,7% des cas de rechutes). Ceci est déjà préoccupant, un autre point l’étant peut-être encore d’avantage reposant sur la constatation surprenante que certains patients de la série semblaient ne pas s’améliorer sous traitement malgré l’absence de résistance identifiée chez eux : y aurait-il donc d’autres loci encore non identifiés de résistance bactérienne ?…

PROFILE OF SNP TYPING AND DNA MUTATION FOR DRUG RESISTANCE IN STRAINS OF M. LEPRAE FROM LEPROSY PATIENTS IN PARÁ STATE, NORTHERN BRAZIL, AMAZON REGION R.C. Bouth, A. R. Gobbo, S.M. Silva, A.C.C. Messias, C. Avanzi,  S.T. Cole, J.G. Barreto , M.B. Silva, J.S. Spencer, C.G. Salgado

Par ailleurs, une étude menée dans un village reculé (amazonien) s’étant développé sur le site d’une ancienne léproserie a été présentée. Sur 758 sujets examinés, une lèpre multibacillaire a été diagnostiquée chez 37 d’entre eux (19 nouveaux cas, 18 rechutes) ; 43% présentaient une résistance ; 12 cas étaient multirésistants (dapsone et rifampicine). Il semblait exister une transmission intrafamiliale de souches résistantes. Ce scénario particulièrement alarmant, même s’il reste cantonné à une zone très particulière, incite à l’évidence à une grande vigilance.

EMERGING AND TRANSMISSION OF DRUG/MULTIDRUG RESISTANT Mycobacterium leprae IN A FORMER LEPROSY COLONY LOCATED IN THE BRAZILIAN AMAZON. Helena R. S D’Espindula, Patrícia S. Rosa, Ana C. L. Melo, Amanda N. B. Fontes, Amanda J. Finardi, Andréa F. F. Belone, Beatriz G, C. Sartori, Carla A. A. Pires, Cleverson T. Soares, Flávio B. Marques,Francisco J. D. Branco, Ida M. F. D. Baptista, Lázara M. Trino, Luciana R. V. Fachin, Marília B. Xavier, Marcos C. Floriano, Somei Ura, Suzana M. Diório, Wladimir F. B. Delanina, Milton O. Moraes, Marcos C. L. Virmond, Philip N. Suffys, Marcelo T. Mira 

(A. Mahé)

Et l’anapath ?…

L’anatomie pathologique, parfois considérée comme un luxe, est en fait accessible désormais dans de nombreux centres. Son apport diagnostique peut être très intéressant dans certains cas difficiles, parfois déterminant.

Deux articles du dernier numéro du BALLF (numéro 37 – 2022) abordent la question.

… Une mise au point sur les aspects pris par les lèpres tuberculoïdes (Dr Alain Gaulier)

… Une analyse de l’ouvrage référence dans ce domaine, qui vient de paraître et dont nous ne saurions trop recommander la lecture à tous les léprologues

HISTOPATHOLOGICAL DIAGNOSIS OF LEPROSY
DE CLEVERSON TEIXERA SOARES, BENTHAM BOOKS ED, 2021

Un nouveau guide de prise en charge des réactions lépreuses

L’Organisation Mondiale de la Santé a publié tout récemment un Guide de prise en charge des réactions lépreuses et de prévention des infirmités (Leprosy/Hansen disease : management of reactions and prevention of disabilities).

Ce document d’une soixantaine de pages constitue une revue très complète et très pratique de ces différents sujets, dont on peut souligner qu’ils représentent le principal écueil actuel de la lutte contre la lèpre. En effet, si la prise en charge purement bactériologique de la maladie peut être considérée comme assurée dans la très grande majorité des cas, les réactions lépreuses représentent aujourd’hui la principale cause d’infirmité liée à cette maladie. C’est dire l’importance de leur dépistage et de leur prise en charge, le plus précocement possible et selon des moyens éprouvés.

Certains points développés dans ce document nous semblent fort judicieusement mis en exergue : la possibilité de névrites « silencieuses », indolores mais pas moins destructrices pour autant, qui ne pourront être diagnostiquées que par des bilans neurologiques standardisés effectués régulièrement lors du suivi de patients connus; la reconnaissance de l’existence de douleurs neuropathiques non névritiques, volontiers tardives et relevant d’une prise en charge médicamenteuse spécifique à ce type de douleurs (gabapentine, amitriptyline), très différente donc de celle d’une authentique névrite; les recommandations visant à standardiser la recherche de troubles neurologiques lors du suivi des patients, notamment sur le plan sensitif ; l’inutilité de traiter une névrite installée depuis plus de 6 mois.

On peut regretter l’absence de recommandations innovantes concernant les difficiles formes récidivantes de réactions (notamment des réactions de type 2), mais des données non formellement établies n’avaient sans doute pas leur place dans un tel document se voulant manifestement consensuel.

De nombreux algorithmes et schémas complètent ce document extrêmement utile que tout léprologue devrait conserver à portée de main !

Dr Antoine Mahé, le 23/11/2020

C’est la rentrée ! 😉

En vrac, quelques nouveautés intéressantes en ce début de mois de septembre 2020 (léprologiques, ou pas…)

Les maladies tropicales négligées : une problématique devenue primordiale

– Une conférence internationale (virtuelle) sur cette thématique à suivre via @NTD_NGOs et #NNN2020

– Une consultation ouverte par l’OMS pour recueillir des propositions spontanées concernant la prise en charge intégrée des maladies tropicales négligées à expression cutanée (#skinNTDs bit.ly/2YZoQFu)

– l’importance d’un accès sécurisé à l’eau (#beatNTDs: ow.ly/4BEB50B8kg9, #Worldwaterweek)

La transmission du virus sauvage de la poliomyélite éradiquée en Afrique

#polio

Un Diplôme d’Université (D.U.) consacré à la « médecine de la diversité« 

La Faculté de médecine de Strasbourg, France, ouvre les inscriptions pour un D.U. innovant consacré aux conséquences médicales liées à la diversité des origines, problématique en expansion du fait d’un brassage croissant des populations. L’inscription et la délivrance des cours de ce D.U., ouvert électivement aux médecins, se font via internet. Les modalités d’inscription et une présentation détaillée sont accessibles via les liens suivants: http://unistramed.u-strasbg.fr/var/ezwebin_site/storage/original/application/691016e78cb062cbda1ebe0fe5214e9d.pdf, et http://med.unistra.fr/fre/Inscription/Formation-medicale-continue

Fréquentation du site de l’ALLF (2020)

Chers associés,

veuillez trouver ci-dessus la cartographie de fréquentation du site de l’ALLF (https://allf.medicalistes.fr/), du 01/01/2020 à aujourd’hui, où l’on voit que les principaux pays de connexion sont les USA, la France, la Chine et les Pays-Bas (plus la couleur tire vers le vert, plus la fréquentation est importante) !

En tout, depuis le 1er janvier 2020, 734 visites !

bien à vous tous

Antoine Mahé

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